Discours du Service mensuel d'août '08

Hironori KOBAYASHI (Membre du Comité du TEC)

Aujourd'hui, j'aimerais que l'on réfléchisse sur un des Enseignement « les huit poussières mentales », surtout, le « kawaï », qui signifie en français "l'égoïsme".

Il est enseigné dans la Doctrine de Tenrikyô que les huit poussières mentales sont des sources ou l'origine de maladie et de souffrance de la vie humaine. Jour après jour, nous récitons « Puissiez-vous balayer tous les maux et nous sauver, Ô Tenri Ô no Mikoto », « les maux »  dont on parle dans ce chant sont les huit poussières mentales. C'est pour cela que les gestes de mains expriment le balayage de notre propre cœur.  C'est en effectuant ces gestes des mains  que nous récitons sans cesse « Puissiez-vous balayer tous les maux et nous sauver, Ô Tenri Ô no Mikoto »pour toute sorte d'occasion, par exemple : le Service quotidien, le Service mensuel et le Service occasionnel pour prier quelque chose en particulier.

Nous entendons souvent « le Service de supplication » ou « le Service de remerciement ». Mais il n'existe pas de chant particulier pour ses Services de supplication et de remerciement. Nous récitons toujours « Puissiez-vous balayer tous les maux et nous sauver, Ô Tenri Ô no Miko ». Il en va de même  pour l'administration du « Sazuke » pour la guérison de maladie.

Nous pouvons donc dire que le chant « Puissiez-vous balayer tous les maux… » est fondamental dans l'Enseignement. C'est-à-dire que le balayage des poussières mentales est la première étape de la Vie de Joie qui est le but ultime de la vie humaine. 

Nous prions les mains jointes en récitant « ashiki », c'est-à-dire « le mal » au début de tous les Services. Cela signifie que nous devons tout d'abord méditer sur les poussières mentales dans notre propre cœur.

Nous devons donc bien réfléchir à la raison pour laquelle nous méditons avant tout sur nos propres poussières mentales. Nous pouvons y retrouver le profond amour de Dieu Parent, Oyagami qui souhaite sauver les hommes.

Les huit poussières mentales sont nommées par Oyasama, la Fondatrice: la mesquinerie, la convoitise, la haine, l'égoïsme, la rancune, la colère, l'avidité et l'orgueil. Mais pourquoi en ce jour, je ne vous parle que de « l'égoïsme », « kawaï » en japonais ? C'est parce que je me suis aperçu que c'est une des poussière qui s'amoncelle le plus en quantité ou celle que j'ai tendance à laisser amonceler le plus facilement dans mon propre cœur.

Avant de continuer mon discours, il nous faut nous mettre d'accord sur la traduction française « l'égoïsme ».

D'abord, Oyasama nous a enseigné le « kawaï » comme une des huit poussières et le mot « l'égoïsme » en est sa traduction française. Voici la définition que j'ai trouvé pour « l'égoïsme » dans le dictionnaire français : Attachement excessif à soi-même qui fait que l'on recherche exclusivement son plaisir et son intérêt personels. (LE ROBERT). Et la signification japonaise pour « l'égoïsme » est donnée comme : « Riko-shugi »  et « e-go-i-zu-mu» (ROYAL). La signification française pour « l'égoïsme » dans le dictionnaire donne presque la même explication pour celle de « kawaï » par l'Eglise mère. Je ne trouve donc aucun problème dans cette traduction. Ce « kawaï » est bien traduit en français.

Par contre, quand on voit la signification pour « kawaï » dans le dictionnaire japonais-français, il est écrit, « mignon, gentil(e), joli(e), adorable, petit(e) » (ROYAL). Lorsque l'on demande une signification de « kawai » aux japonais, j'imagine qu'il y en a très peu qui réponde que c'est « l'égoïsme ». Ce que je veux dire c'est  que « l'égoïsme » est la traduction pour un état excessif de « kawaï ».  Et il n'y a pas de sens négatif dans le mot « kawaï » en lui-même.

Mais pourquoi Oyasama nous a t-elle évoqué cette poussière sous le nom de« kawaï »? Pourquoi ne pas avoir employé les mots tels que « riko-shugi » soit disant « l'égoïsme » ou « shûchaku », c'est-à-dire « attachement excessif » ? Quand on entend « riko-shugi » ou « shûchaku », nous, les japonais, avons une image péjorative, comme pour les autres poussières par exemple : « la haine, la rancune, la colère, l'avidité ». Mais quand nous entendons « kawaï », nous avons au contraire une image positive du terme.

J'ai donc cru tout d'abord que le mot « kawaï » était employé comme un mot indésirable à l'époque où Oyasama était encore visible. La modification du sens des mots au fils des époques est une chose courante. Mais en réalité nous pouvons trouver plusieurs fois ce terme « kawaï » dans « l'Ofudesaki, Ecrits au fil du pinceau Divin »  qu'Oyasama a écrit par sa propre main.

Par exemple :

Par « amour »  pour ses enfants du monde entier,
je me donne toutes les peines. (IV-63.)

Pensez plutôt aux avertissements de l'homme à ses enfants !
C'est  par  « amour »  pour eux qu'il se met en colère. (V-23.)

Je ne suis qu'  « amour » pour tous mes enfants
et ne fais entre eux aucune différence. (XV-69.)

Ne vous demandez pas pourquoi je parle ainsi :
c'est par trop-plein d'  « amour ». (XVI-41.)

Pour Tsukihi, les êtres de la terre entière sont ses enfants.
Il est plein d'« amour » pour eux. (XVII-68.)

Dans ces versets de l'Ofudesaki, le mot « amour » est exprimé par « kawaï » dans le texte original.  Il n'y a qu'un seul verset dont le mot « kawaï » est traduit par « l'égoïsme » qui est :

Sur le chemin, mesquinerie, convoitise, égoïsme, avidité, orgueil...
C'est cela qui est poussière. (III-96.)

En voyant cette vérité, nous pouvons nous apercevoir que le mot « kawaï » n'était pas employé comme un mot indésirable quand Oyasama a écrit l'Ofudesaki.  Au contraire, il était employé plutôt comme « l'amour ». C'est vrai qu'Oyasama a exprimé l'amour pour ses enfants, c'est-à-dire, l'amour d'Oyagami pour les hommes du monde entier par le mot « kawaï ».

Permettez-moi maintenant de parler un peu de ma famille. Mon premier fils est né l'année dernière en France. Depuis lors, en le voyant, je ne peut m'empêcher de le trouver « kawaï » et  je le fait également remarquer à l'oral. Et puis, je suis très content d'entendre les gens dire de lui qu'il est lui « kawaï », « mignon ».  C'est un peu difficile à comprendre pour les gens qui ne parlent pas japonais. Mais le mot « kawaï » est une expression très courante dans la vie quotidienne. Je pense que tout le monde dit « kawaï » en voyant un petit bébé, un petit chien, une jolie fille etc. Je me suis donc posé une question : comment pouvons-nous exprimer ce sentiment d'affectio à l'égard de notre enfant si « kawaï » est une des poussières mentales.

Cependant j'ai réfléchi encore une fois sur ce sujet. N'y a-il pas quelque chose de très important au fait que « kawaï» soit une des huit poussières dans l'Enseignement d'Oyagami ?

En enseignant les huit poussières mentales, Oyasama a insisté sur un autre Enseignement « la chose prêtée / empruntée » qui est dans le chapitre VII dans « la Doctrine de Tenrikyô » avec « les huit poussières mentales ». Cela veut dire qu'Oyagami prête un corps au cœur de chacun d'entre nous, autrement dit, le cœur de chacun de nous emprunte un corps à Oyagami.

Mais nous n'avons pas fait de contrat de location de notre corps avec Oyagami pour autant. Nous ne trouvons pas non plus une marque d'Oyagami quelque part sur notre corps. Nous avons donc tendance à l'oublier facilement en vivant dans la bonne santé même si nous l'avons compris en écoutant cet Enseignement à maintes reprises. Nous avons même tendance à penser que notre corps est à nous-mêmes en disant « je peux voir, entendre, sentir, manger, boire, parler et bouger les mains et les pieds comme bon me semble» et « c'est tout à fait normal ».

Après la naissance de mon fils, la première chose que j'ai faite est de vérifier s'il était en bonne santé. Après avoir vérifié, j'ai éprouvé une grande joie. Et je me suis aussi inquiété de la santé de ma femme. Et en la voyant en bonne santé, je me suis senti encore  plus heureux. En accompagnant l'accouchement de ma femme, je n'ai ressentie que de la reconnaissance envers Oyagami et aux gens aux alentours. Et j'ai bien pris conscience de l'Enseignement « la chose prêtée / empruntée ».

Mais au fil des jours, le sentiment que j'avais éprouvé lors de la naissance de mon fils commençait à changer. Et j'étais tombé à mon insu dans  l'idée que la bonne santé de mon fils était « normal ». Ce n'est pas que j'avais oublié le sentiment de gratitude que j'avais éprouvé envers Oyagami et aux gens alentours. Cependant en disant « merci, merci... », je croyais aussi en même temps « c'est normal » et « c'est naturel ».

C'est alors que mon fils, encore âgé de trois ou quatre mois est resté constipé pendant une semaine. Inquiets, ma femme et moi avons essayé des tas de choses, mais aucune amélioration n'était visible. Heureusement il a finalement fini par faire ces besoins. Bien que nous ne savions pas quelle était la cause de sa constipation,  nous étions tellement soulagé que nous avons crié à haute voix « Ah, il a fait caca, il l'a fait ». C'est alors que je me suis dit « Quelles sont grandes les joies que nous  donnent ces petites choses de la vie! » et je me suis à nouveau rappelé le sentiment de remerciement à Oyagami et l'Enseignement « la chose prêtée / empruntée ».

Ma femme et moi aimons mon fils. Nous ne pouvons nous empêcher de le trouver « kawaï ». C'est normal, n'est-ce pas ? Je doute qu'une personne dise que « c'est une erreur » ou que « c'est une poussière ». Mais en disant « j'aime mon fils, kawaï », mais je redoute qu'un jour cela devienne « j'aime ma personne, c'est pour moi-même, kawaï ». Je pense que « Kawaï » n'est pas une attitude mentale indésirable  mais, si on se laisse à croire que « c'est normal », ce serait alors une poussière.

A bien y réfléchir, ce genre de choses m'arrivent souvent. Et c'est pourquoi Oyasama a employé le mot « kawaï » comme une des huit poussières. Des choses que tout le monde considère comme « normal », à force de dire « c'est normal, c'est normal », je néglige à réfléchir sur mon attitude mentale parce que je crois « c'est normale ».

Je pourrais dire que ce n'est pas seulement le cas avec mon fils mais aussi dans d'autres situations. Par exemple, quand je fais quelque chose pour les autres, je pense d'abord « c'est pour les autres », mais au fil des jours, en disant « c'est pour les autres », cela devient petit à petit « pour moi-même », et finalement, je me surprends à penser : « Je les aide, n'ont-ils pas quelque chose d'important à me dire ? ».  Un autre exemple :au début, je fais quelque chose en signe de remerciement à Oyagami, cet acte est appelé  « hinokishin » , mais au fils du temps, je finis par espérer une sorte de récompense, et enfin, je me dis « Même si je fais beaucoup de hinokishin, il ne m'arrive jamais de bonnes choses ou des choses extraordinaires ».

J'ai su à travers la réflexion sur « kawaï » pour mon fils, que lorsque je fais quelque chose « pour sauver autrui » ou « en signe du remerciement », etc, je ne peux pas facilement conscience de mes propres poussières accumulées parce que je crois que ce sont des actes respectables . J'ai entendu dire qu'on les appelait « les poussières dans la sincérité ».

Si Oyasama exprime des poussières comme le vol, l'adultère, la violence, le meurtre, le blasphème, etc. ce serait plus claire aux yeux des hommes. Mais dans ce cas, il serait déjà trop tard au moment où l'on s'en apercevra ?

Il nous faut aussi réfléchir sur le mot « poussière ». La question n'est pas de savoir si nous avons des poussières dans notre cœur ou pas. Par exemple, il y a des poussières sur la table devant moi. Il y en a aussi beaucoup dans l'espace de ce sanctuaire. Il y a peut-être des gens qui les voient mais d'autres ne les voient pas. Il en va de même pour notre cœur. Même si nous ne nous en apercevons pas, il y a tout de même un peu de poussières dans notre cœur. C'est pour cela qu'Oyasama a dit « Faites le Service ».

Mais ce n'est jamais pour scruter des poussières dans le cœur d'autrui. C'est pour cela qu'Oyasama nous a enseigné le Service avec les gestes des mains qui balayent notre propre cœur.

Je voudrais maintenant lire une des anecdotes sur « la Vie d'Oyasama ».

Cela passera en 1883. Naokichi Takai - qui n'avait pas encore trente ans - avait été envoyé, sur l'ordre d'Oyasama, sauver un malade dans un village à trois lieues au sud de la Résidence. Alors que le jeune homme lui donnait toute les explications de l'Enseigement touchant la maladie, le malade énervé lui coupa sèchement la parole d'un « Ecoutez ! Moi, je n'ai jamais rien fait de mal dans ma vie ! » Déconcerté, Takai lui dit : « Oyasama ne m'a encore pas instruit sur ce point. Mieux vaut donc que j'aille le lui demander tout de suite. »

Et il retourna en courant les trois lieues. Oyasama lui tint ce discours :

« Eh bien, c'est tout comme dans une maison même neuve : on aura beau calfeutrer portes et fenêtres, au bout de dix, vingt jours, si le nettoyage n'est pas fait, il y aura tellement de poussière qu'on pourra écrire sur le tatami ! Ou bien encore comme un miroir : s'il y a beaucoup de poussière dessus, on la remarque, on la nettoie. Par contre, s'il ne s'agit que d'un tout petit grain, on ne le verra pas, on le laissera. Mais c'est justement ce petit grain-là qui tachera le miroir et finira par le ternir. Va lui parler de cela ! »

Takai, l'ayant remerciée, refit sur-le-champ le trajet des trois lieues et transmit au malade les paroles d'Oyasama. « Maintenant, je comprend et je regrette de vous avoir parlé si grossièrement ! » déclara aussitôt ce dernier, et il se confondit en excuses. Par la suite, il se convertit et obtint sa guérison complète grâce à la protection de Dieu.

(ANECDOTES sur LA VIE D'OYASAMA, 130. « Le moindre grain de poussière », P.128)

Nous allons célébrer le quarantième anniversaire du Tenrikyô Europe Centre dans deux ans. À présent, nous oeuvrons pour l'installation du petit temple d'Oyagami dans chaque maison des fidèles. Mais l'installation du petit temple n'est pas le but en lui-même. Le but, c'est de balayer les poussières mentales quotidiennement en vertu du Service. Et ce n'est pas seulement un appel de la part du Tenrikyô Europe Centre mais aussi celui de la part d'Oyagami par la bouche d'Oyasama.

Oyasama a révélé la volonté d'Oyagami : « Je suis venu du ciel pour sauver l'humanité entière » et nous a enseigné le Service « Puissiez-vous balayer tous les maux et nous sauver, Ô Tenri Ô no Mikoto ».  Elle n'a pas dit « Faites le salut spectaculaire » mais « Faites le Service ». Je suis convaincu que c'est le premier pas de la foi et aussi l'activité la plus importante pour sauver les hommes du monde entier, balayer les poussières mentales en vertu du Service.

Aujourd'hui, nous avons célébré le Service mensuel au Tenrikyô Europe Centre. C'est le jour où nous faisons le grand nettoyage de notre propre cœur. Maintenant, je voudrais terminer mon discours en priant afin qu'Oyagami reçoive bien notre cœur bien nettoyé par le Service pour qu'il nous conduise encore avec bienveillance jusqu'au mois prochain et pour que nous puissions nous rassembler ce même jour du mois prochain pour célébrer ensemble le Service mensuel.

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